• Colloque "Guerre d'Algérie : Savoir et Transmettre" du 4 février 2015 à l'Hôtel de Ville de Paris *** Interventions de Jean-François Gavoury et de Jean-Philippe Ould Aoudia

    Colloque "Guerre d'Algérie : Savoir et Transmettre" du 4 février 2015 à l'Hôtel de Ville de Paris *** Interventions de Jean-François Gavoury et de Jean-Philippe Ould Aoudia

    Interventions de Jean-François Gavoury, président de l’Association nationale pour la protection de la mémoire des victimes de l’OAS (ANPROMEVO), et de Jean-Philippe Ould Aoudia, président de l’association Les amis de Max Marchand, de Mouloud Feraoun et de leurs Compagnons, lors du colloque organisé à l’Hôtel de Ville de Paris le 4 février 2015 sur le thème Guerre d’Algérie : Savoir et Transmettre, par la Commission Mémoire-Histoire de la FNACA à l’occasion de son 30e anniversaire.

     

    Colloque "Guerre d'Algérie : Savoir et Transmettre" du 4 février 2015 à l'Hôtel de Ville de Paris *** Interventions de Jean-François Gavoury et de Jean-Philippe Ould Aoudia

     Jean-François Gavoury

     

    « Les victimes de l'OAS sont restées dans le silence des décennies durant, y compris lors de la publication des lois d'amnistie et de réhabilitation visant les criminels de cette organisation, y compris lorsque le gouvernement a dépêché l'un de ses membres en juin 1980 pour présider, à Toulon, une cérémonie d'inauguration d'un monument érigeant en martyr et héros le chef des commandos Delta de l'OAS, Roger Degueldre.

    Les victimes de l'OAS n'ont pas  voulu ni su faire acte de transmission parce que cette inversion des valeurs incarnées par la République elle-même le leur interdisait : comment ne pas avoir honte d'être apparenté à la victime, eût-elle été citée à l'ordre de la Nation et reconnue "Mort pour la France", d'une organisation se réclamant de la résistance de l'Algérie française ? Comment revendiquer le moindre droit à la parole lorsque, âgé(e) de quatre à cinq ans, on a survécu à un attentat dont les auteurs peuvent rendre compte à tour de pages et de déclarations sans être inquiétés ?

    Le premier, probablement, à avoir osé publier sur un crime de l'OAS resté impuni, non pour s'en targuer mais au contraire pour en relater les circonstances et en dénoncer l'ignominie, est Jean-Philippe Ould Aoudia, avec L'assassinat de Château-Royal. Et c'est avec lui, avec son association Les amis de Max Marchand, de Mouloud Feraoun et de leurs Compagnons, avec la FNDIRP que l'Anpromevo  est née, en février 2006, après que nous soyons trouvés, alertés par un retentissant projet d'hommage public à l'OAS, sous la forme d'une énième stèle, à Marignane cette fois, porté par des anciens activistes et appuyé par un maire issu du Front national.

    Et c'est un nouveau maire extrémiste, à Béziers, qui entend débaptiser une rue du 19 mars 1962 pour lui donner le nom d'un officier putschiste, Hélie Denoix de Saint Marc.

    À titre personnel je ne le laisserai pas faire pour plusieurs raisons :

    - la première, la fidélité : la fidélité à la mémoire de Guy Fischer, qui cita mon père et me cita en séance du Sénat consacrée à la présentation de la proposition de loi tendant à faire du 19 mars la journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes de la guerre d’Algérie ;

    - la seconde raison : la fidélité à l'égard de M. Bertrand Delanoë, de Mmes Anne Hidalgo et Catherine Vieu-Charier, de la FNACA, de l'ARAC et de toutes les associations amies de l'Anpromevo qui ont permis qu'un certain 6 octobre 2011, sur un remarquable emplacement du cimetière du Père-Lachaise, un Mémorial soit élevé pour rendre témoignage du sacrifice des militaires, des civils, des élus, des magistrats, fonctionnaires, enseignants tombés au service de la République sous les coups d'une organisation idéologiquement criminelle et, dans ses actes,  barbare ;

    - une autre raison tient à la relative facilité de la contestation de ce projet de la commune de Béziers devant une juridiction administrative, saisie par mes soins dans les trois semaines suivant la délibération du conseil municipal du 11 décembre.

    Dois-je ajouter que le silence n'est plus de mise parmi les victimes de l'OAS, dont l'association a été l'objet d'un acte de reconnaissance officiel l'an dernier, puisqu'une décision de Kader Arif en a fait la 50e association d'anciens combattants et victimes de guerre habilitée à ester en justice ?

    Et puis-je conclure en affirmant que, si la FNACA appelle à un contre-rassemblement républicain à Béziers le 14 mars à 14 h30 pour s'opposer à ce que la plaque portant la date du 19 mars 1962 soit déboulonnée et remplacée par une autre célébrant le putsch auquel les appelés ont refusé de se rallier en avril 1961, je serai à ses côtés comme je l'ai été pour la reconnaissance du 19 mars ? »

     

    Colloque "Guerre d'Algérie : Savoir et Transmettre" du 4 février 2015 à l'Hôtel de Ville de Paris *** Interventions de Jean-François Gavoury et de Jean-Philippe Ould Aoudia

     

    Colloque "Guerre d'Algérie : Savoir et Transmettre" du 4 février 2015 à l'Hôtel de Ville de Paris *** Interventions de Jean-François Gavoury et de Jean-Philippe Ould Aoudia

    Jean-Philippe Ould Aoudia

     

    « La présence à la même tribune de deux fils de victimes de l’OAS est un symbole fort :

    - Jean-François Gavoury, fils de Roger Gavoury, commissaire central d’Alger et premier responsable de l’ordre public assassiné par les terroristes de l’OAS le 31 mai 1961, est président de l’Association nationale pour la protection de la mémoire des victimes de l’OAS,

    - moi-même, fils de l’un des six inspecteurs des Centres sociaux éducatifs assassinés collectivement le 15 mars 1962 à El Biar, sur leur lieu de travail et dans l’exercice de leur mission d’éducation, je préside l’association Les amis de Max Marchand, de Mouloud Feraoun et de leurs Compagnons.

    Si elles travaillent sur des terrains différents, nos deux associations sont complémentaires et profondément solidaires.

    Un inspecteur d’académie de Saint-Nazaire qui n’avait jamais été en Algérie et qui ne connaissait aucune des six victimes a créé, il y a une vingtaine d’années, notre association pour que l’œuvre pédagogique et littéraire de ses collègues enseignants ne tombe pas dans l’oubli.

    Il me parait utile de rappeler les circonstances du crime, car elles entrent en résonance avec le massacre du 7 janvier 2015 à Paris. Même si « Un crime n’en vaut pas un autre, [si] chaque crime a sa figure » comme l’avait écrit François Mauriac après celui commis par l’OAS, l’un et l’autre présentent de sinistres similitudes.

    À commencer par le procédé pour tuer. À Alger, un commando de six tueurs, surarmés, entraînés et décidés avait fait irruption dans les locaux administratifs où se trouvaient réunis les principaux responsables d’un service de l’Éducation nationale qui avait pour mission de transmettre à la jeunesse algérienne les traditions les plus nobles de l’enseignement républicain.  À la main, ils tenaient un stylo.

    Le 15 mars 1962, six noms inscrits sur une petite feuille furent appelés parmi les dix-huit présents dans les bureaux des Centres sociaux. Les six victimes furent alignées devant un mur à l’extérieur de la salle et mitraillées, puis achevées par des coups de grâce.

    Une minute de silence fut respectée dans tous les établissements scolaires après la lecture d’un message du ministre de l’Éducation nationale de l’époque. Il y eut le refus de la part d’élèves d’honorer la mémoire des six enseignants, comme ce fut le cas en janvier dernier.

    Le crime de l’OAS répond aux trois critères qui définissent le crime fasciste :

    - il a une motivation idéologique, d’où le choix de victimes ciblées. Il ne s’agit pas d’un attentat aveugle.

    - il a un côté spectaculaire, destiné à montrer le jusqu’au-boutisme de ceux qui l’ont commis ;

    - il est hors norme, pour créer un climat de terreur.

    Dans sa Une, Le Monde du 19 mars 1962 reproduisait un article de Germaine Tillion sous le titre « La bêtise qui froidement assassine », qualifiant les terroristes de l’OAS de singes sanglants qui font la loi à Alger.

    Ces singes sanglants n’ont pas fait la loi à Alger puisque l’Algérie a été indépendante. Les singes sanglants qui veulent faire la loi à Paris ne la feront pas non plus.

    Mais il est encore d’anciens criminels de l’OAS dans leur toute puissance, tels Gabriel Anglade, l’un des six tueurs du 15 mars 1962, qui a été adjoint au maire de Cagnes-sur-Mer pendant quatorze ans. Ces gens-là sont à la manœuvre pour réécrire l’histoire, comme cela sera le cas le 14 mars prochain à Béziers, où un officier putschiste est comparé à Jean Moulin et où une rue portera le nom d’un traitre à la République à la place de la date du 19 mars 1962.

    Notre association publie une revue, Le Lien, dont la qualité lui vaut d’être inscrite au catalogue international des revues. Elle organise chaque année, autour de la date du 15 mars, un colloque dans une ville de province où réside l’un de ses adhérents.

    Le 12 décembre 2001, grâce à Jack Lang, ministre de l’Education nationale, une plaque commémorative a été apposée à l’entrée de la Salle Marchand-Feraoun, au 101 rue de Grenelle à Paris. Après les noms et qualités des six enseignants, on peut lire : […] assassinés dans l’exercice de leurs fonctions le 15 mars 1962 à Alger, victimes de leur engagement pour les valeurs de la République et pour l’indépendance de l’Algérie dans une relation fraternelle avec la France.

    C’est là que se déroule désormais l’assemblée générale annuelle, précédée d’un hommage aux six victimes devant la plaque commémorative.

    M. Serge Drouot a souhaité que, chaque 19 mars, la FNACA puisse rendre hommage aux six dirigeants des Centres sociaux éducatifs. Ce fut le cas l’an dernier avec les porte-drapeaux de la FNACA du 7e arrondissement. Ce sera le cas cette année encore, la ministre de l’Éducation nationale pouvant être présent en fonction de son emploi du temps.

    Que Serge Drouot soit ici chaleureusement remercié. »

     

     

    « 1891, un étranger est venu, et « cet étranger a spolié par la force, les biens des légitimes habitants d’Algérie » Un article de Michel Berthelemy de l’association 4ACG1962 : l’exode de Ghislaine, oranaise ... Un article de la Ligue des Droits de l'Homme de Toulon »

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