• Demain mardi 16 juin 2015 à 19 heures, à la Mairie du 2e arrondissement à Paris : réunion/débat autour du "Livre Nostalgérie, l'interminable histoire de l'OAS"

     

    Demain mardi 16 juin 2015 à 19 heures, à la Mairie du 2e arrondissement à Paris : réunion/débat autour du Livre Nostalgérie, l'interminable histoire de l'OASé

    Nostalgérie, l’interminable histoire de l’OAS

    Demain mardi 16 juin à 19 heures, à la Mairie du 2e arrondissement, Salle des expositions, 1er étage, 8, rue de la Banque (Métro Bourse)

    Les AMD-Paris et la Fédération de Paris de la Ligue des Droits de l’Homme vous invitent à une réunion/débat autour du livre d’Alain Ruscio, récemment paru aux éditions La Découverte : « Nostalgérie, l’interminable histoire de l’OAS », avec

    • Alain Ruscio, historien, auteur de plusieurs ouvrages sur l’histoire coloniale française, et
    • Gilles Manceron, historien, délégué « mémoire, histoire, archives » de la Ligue des Droits de l’Homme, auteurs de plusieurs ouvrages sur l’histoire de la colonisation et sur les droits de l’Homme

    Entrée libre et gratuite, sans réservation
    Contact : amis.diplo.75@gmail.com

    Alain Ruscio :
    (4ème de couverture du livre)

    Pour des centaines de milliers d’Européens qui ont naguère vécu en Algérie, l’idéalisation du passé s’est transformée en une « nostalgérie », beau mot chargé de mélancolie. Mais le drame commence lorsqu’on constate qu’une seule famille politique française, celle des anciens de l’Organisation armée secrète (OAS) et de leurs héritiers, l’a malhonnêtement et durablement instrumentalisée. Non contents d’avoir mené toute une communauté à l’impasse puis à l’exil, les « ultras » de l’Algérie française ont tenté, depuis, d’accaparer sa mémoire. Et ils y sont en partie parvenus.

    Ces hommes ont fait le choix, à partir de février 1961, d’enclencher en toute connaissance de cause une incroyable spirale de violence terroriste, en Algérie comme en France. Alain Ruscio propose dans ce livre un récit synthétique des racines et de l’histoire de ce tragique épisode, ainsi que de ses séquelles contemporaines. Mobilisant un impressionnant corpus documentaire - dont beaucoup de Mémoires d’anciens de l’OAS -, l’auteur retrace la dérive de ces officiers à l’idéal patriotique dévoyé, militants fascisants et petits malfrats transformés en assassins, qui ont eu l’incroyable prétention de « bloquer l’histoire », comme l’avait écrit Pierre Nora dès 1961. Enfin, Alain Ruscio explique comment et pourquoi la mémoire brûlante de ces années de folie meurtrière travaille toujours, de façon souterraine, la société française.

    Ce livre est une précieuse réponse à l’un des derniers négationnismes que véhicule encore une certaine histoire coloniale « à la française ».

    Gilles Manceron :

    Le passé colonial est un « trou de mémoire français ». La France n’est pas la seule puissance coloniale mais, parmi celles-ci, c’est elle qui a le plus de mal à reconnaître cette page de son passé. Son « poids » actuel est à rapprocher de ses particularités : la longueur de sa période coloniale, plus précoce et plus tardive que d’autres, le fait qu’elle a été prolongée par les guerres coloniales - et aussi par la « Françafrique ». En même temps, c’est un phénomène périphérique à l’histoire de la France, qui a toujours été l’objet de contestations ; il y a toujours eu séparation entre l’espace colonial et l’espace hexagonal (le statut d’esclave aux XVIIe-XVIIIe siècles ne s’étendait pas au royaume) ; mais, il y a eu un « effet de retour », une infiltration idéologique durable dans la société française. Avec la IIIe République et les suivantes, le phénomène colonial, resté lointain, méconnu, s’est accompagné de l’omniprésence d’un discours de justification invoquant les droits de l’homme et l’œuvre civilisatrice.

    La décolonisation a été difficile et « honteuse », d’où des « trous de mémoire » de la droite comme de la gauche. La Résistance et la France Libre étaient majoritairement coloniales. De Gaulle en 1958 s’est appuyé sur les ultras de la colonisation mais il a joué un rôle essentiel ensuite pour décoloniser : la droite s’est fracturée, d’où son « trou de mémoire » sur ce sujet. La gauche aussi s’est fracturée, elle a été majoritairement coloniale ; le courant communiste faisant preuve d’un « anticolonialisme à éclipses », troublé par le contexte de la guerre froide et son combat antigaulliste pour des enjeux intérieurs ; il doit aussi assumer sa part de reconnaissance.

    Les mécanismes de l’occultation de la colonisation en France sont complexes : le mythe résistancialiste y a contribué, comme les amnisties et réhabilitations successives depuis 1962. La violence et la « proximité » du cas algérien sont évidentes ; de nombreuses « communautés » sont liées à son histoire : militaires et appelés, rapatriés, « harkis », immigrés et leurs descendants. D’où une « maladie algérienne » de la France dont les symptômes sont, non seulement la singulière permanence du courant des partisans de « l’Algérie française », mais aussi le racisme anti-arabe et l’islamophobie d’aujourd’hui.

    Cependant, il y a de solides points d’appui dans l’histoire française pour une sortie du colonialisme. La République a été coloniale, mais elle est par essence anticolonialiste. Comme on a distingué le « socialisme réel » de l’idée socialiste, nous devons débarrasser l’idée républicaine, en les reconnaissant, des pages noires de la « République réelle ».

     

     Marie-Joëlle Rupp

    Si la décolonisation des territoires appartient désormais à l’Histoire, l’idéologie coloniale, en revanche, n’a jamais cessé de hanter l’imaginaire d’une partie de la société française.

    Cette volonté de retour à un passé colonial mythifié s’exprime à travers la multiplication, ces dernières années, des commémorations et lieux de mémoire — 70 à ce jour — à la gloire de l’Algérie française et des chefs de l’OAS dont certains furent condamnés à mort et exécutés pour leurs actes criminels.
    Alain Ruscio dont les travaux font référence en matière d’histoire coloniale propose dans son ouvrage Nostalgérie, sous-titré L’interminable histoire de l’OAS (La Découverte) un rappel de l’origine, de la nature et des actions de cette organisation et de ses affidés. En arrière-fond, ces interrogations : «Pourquoi les anciens activistes et ultras sont-ils toujours écoutés ?», «Pourquoi une telle mobilisation en France pour la restauration du passé colonial ?». L’un des signes de cette gangrène des esprits est l’accaparement par l’OAS et ses héritiers de cette notion de «nostalgérie» — nostalgie parfois teintée d’amertume de la terre natale —, synonyme d’Algérie heureuse, scellée dans la mémoire pied-noir. Elle est le socle d’une stratégie de reconquête commencée dès les premières années suivant les Accords d’Evian, avec le combat pour l’amnistie des anciens de l’OAS, poursuivie sous Giscard d’Estaing et Mitterrand jusqu’à la nouvelle génération de gaullistes et ses tentatives d’imposer une réécriture de l’Histoire dans le sens d’une reconnaissance du rôle positif de la colonisation. Les réseaux de soutien aux ultras pendant la guerre de libération font, dans cet ouvrage, l’objet d’une étude détaillée rappelant le rôle de chacun, de l’activiste de base jusqu’aux plus hauts représentants de l’Etat : «Ce réseau, des groupuscules d’extrême droite aux sphères gouvernementales, en passant par bien des éléments de l’appareil d’Etat, permet de comprendre l’exceptionnelle efficacité de quelques dizaines d’hommes disséminés sur le territoire de la métropole.» Le rôle trouble de Valéry Giscard d’Estaing dans l’aide apportée à l’organisation est ici évoqué. Quant à la population européenne d’Algérie, même s’il semble outrancier d’affirmer, comme le fait notamment l’opticien Alain Afflelou qu’en 1961 «tous les pieds noirs étaient dans l’OAS», on peut néanmoins parler d’une forte majorité du moins dans le soutien sinon dans l’engagement au combat. Quant à ceux qui condamnaient l’organisation — communistes, libéraux, quelques hommes d’église —, ils devaient se terrer pour ne pas être éliminés. Si l’OAS est née officiellement en février 1961 dans l’Espagne franquiste, une «culture de la milice», fruit d’une «mentalité d’assiégés», termes qu’Alain Ruscio emprunte à Gilbert Meynier, existe quant à elle depuis les tout premiers temps de la colonisation avec la milice africaine de Clauzel.

    Ces milices qui se reconstituent ponctuellement à l’occasion des grands affrontements sont, selon l’auteur, inhérentes aux communautés spoliatrices et minoritaires. On pense à la milice d’Achiary en 1945, aux unités territoriales à partir de 1955, etc. On voit dès lors combien le mythe de l’Algérie heureuse dans laquelle la ségrégation n’aurait jamais existé est illusoire. Pour autant Alain Ruscio refuse l’utilisation du mot apartheid qui appartient selon lui à un autre espace et un autre temps. Pas de séparation de droit donc mais un mur invisible qui dément le mythe pied-noir d’une amitié transcommunautaire généralisée. Et de citer Albert Memmi et Jean Amrouche pour qui il n’y a pas de situation coloniale sans racisme. L’auteur retrace toutes les étapes qui ont mené à la radicalisation meurtrière des ultras depuis la création de l’Oraf (Organisation de résistance nord-africaine) jusqu’à la «course à l’abîme» à partir de 1962. Qualifiée par Mitterrand – garde des Sceaux en 1956 — d’«organisation la plus criminelle», l’Oraf employait la stratégie de la terreur dans le but d’exaspérer les Européens par des attentats attribués au FLN. Aujourd’hui encore, des survivants de l’Oraf revendiquent fièrement les attentats à la bombe et autres crimes comme les assassinats aveugles par corps de métiers au nom d’une soi-disant logique défensive. La responsabilité de la gauche dans le processus qui mena au déchaînement des passions depuis l’abandon du projet Blum-Violette jusqu’à la capitulation de Guy Mollet n’est pas esquivée.

    De la même façon, comme le souligne l’auteur, la résistance française n’a jamais eu de vues émancipatrices en matière coloniale. On trouve parmi les partisans de l’Algérie française beaucoup d’anciens résistants. Ce n’est pas un hasard si Georges Bidault lança en mars 1962, juste avant les accords d’Evian, le CNR, Conseil national de la résistance, couverture de la dernière OAS. Et de fait, l’OAS se drape dans le mythe de la nouvelle résistance.

    L’histoire de l’organisation serait incomplète sans celle des hommes qui la composent. Alain Ruscio tente une typologie de l’activiste, un ensemble éclectique animé par un désir de vengeance et ayant en commun le front du refus. Eclectisme social – petits blancs «passant de l’anisette-kemia à la soirée plastic», civils métropolitains, policiers, étudiants, généraux, déserteurs —, mais aussi éclectisme idéologique puisque l’on y trouve aussi bien des pétainistes non repentis que d’anciens résistants de la France libre. Parmi ces ultras, beaucoup de soldats perdus se sont recyclés après la guerre, au Katanga, Cambodge, Liban, Biafra, certains dans les réseaux de Focard. D’autres terroristes sont devenus des notables, engagés dans l’extrême droite FN ou la droite classique.

    Aujourd’hui ils sont au premier plan du combat mémoriel à la gloire de l’OAS et de ses combattants, profitant du glissement à droite de la société française. L’ouvrage d’Alain Ruscio appelle à la vigilance. Par ce constant balancement entre passé et présent, il met en garde contre la survivance de cette idéologie raciste et fascisante des ultras de l’Algérie française. Il appelle chaque citoyen à lui substituer un combat pour le devoir de vérité.

     

     

     

     

     

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