• Dominique Paganelli : "Ils avaient 20 ans, ils ont fait la guerre d'Algérie"

     

    Dominique Paganelli : "Ils avaient 20 ans

     ils ont fait la guerre d'Algérie"

     Ils avaient 20 ans. Ils ont fait la guerre d'Algérie

     

    C'est un bouleversant récit sur une période sombre et violente de l'histoire de France, que nous livre, dans son ouvrage, Dominique Paganelli, chroniqueur judiciaire, ancien grand reporter.

    De 1954 à 1962 la guerre déchire l'Algérie. Dominique Paganelli n'est encore qu'un enfant mais de Sartène et du Continent, les échos de cette actualité tragique le touchent. Il découvrira plus tard la réalité de cette guerre qui se déroule de l'autre côté de la Méditerranée, et le destin des jeunes appelés d'Algérie, insouciants, partis faire leur devoir pour parfois y mourir ou en revenir meurtris à jamais.

    À travers le témoignage de quelques-uns d'entre eux, devenus célèbres aujourd'hui, l'auteur déroule, dans un style fluide et rythmé, le fil d'un événement majeur, ponctué de faits historiques. On découvre ainsi un pan méconnu de la vie personnelle et intime d'un chanteur, d'un chef d'entreprise, d'un pilote de course automobile ou sportif chevronné, mais aussi d'hommes politiques, hommes de lettres et de cinéma, d'un dessinateur, d'un journaliste... On y croise notamment le champion cycliste Raymond Poulidor, l'écrivain Jean-Claude Carrière, le dessinateur Cabu, le ministre Pierre Joxe... Ils s'en sont tous sortis, mais pas indemnes.

    L'historien Benjamin Stora décrit dans la préface de ce beau livre : «Tel qu'il est, il peut se lire comme un reportage dans les méandres d'une mémoire douloureuse et apporte une contribution importante sur un sujet, la guerre d'Algérie, devenu plus que jamais d'actualité.»

    « Algérie: l'absurde parenthèse »

    http://www.huffingtonpost.fr/dominique-paganelli/guerre-algerie-1962_b_1355269.html 

    Oublier, effacer, fermer l'absurde parenthèse... Quel que soit le mot choisi ou l'expression utilisée, tous les appelés à leur retour d'Algérie, se sont cognés au mur du silence, à celui de l'indifférence. Il leur a fallu vivre avec leurs tourments, leurs cauchemars algériens, sans parvenir à s'en délester. A défaut de les écouter, ils auraient aimé qu'on les entende, ça les aurait apaisés. "Oui ca a été le grand silence, dit Jean Pierre Farkas ancien grand reporter à RTL, Paris Match... Moi c'est vrai je n'ai rien dit, mais on ne m'a rien demandé. Pourtant ça m'aurait soulagé, mais était-ce utile? Notre guerre à nous c'est une guerre qui pue, une guerre qui ne disait pas son nom et dont les Français avaient le sentiment qu'elle était illégitime La guerre de 14-18, on en discutait dans les familles, devant le cadre où étaient accrochées les médailles du grand-père qui avait été dans les tranchées. C'était un héros, comme celui qui, dans les années 40, avait fait de la résistance ou était à Londres ou dans la deuxième DB, pour repousser l'envahisseur allemand. Mais nous?"

    Alors ils ont tout gardé pour eux, tout ravalé, tout dissimulé. Et pour certains, ça a fait un drôle de mélange à l'intérieur, parfois détonnant. Les autres ont dû faire avec.

    Ils avaient 20 ans. Ils ont fait la guerre d'Algérie

    Quand Raymond Poulidor devient champion de France cycliste sur route en 1963, comme tous les vainqueurs, il se plie au protocole. Il accepte tous les bouquets de fleurs qu'on lui tend, il enfile son maillot tricolore et sur la plus haute marche du podium, il se redresse quand La Marseillaise retentit. Ne pense-t-il qu'à sa victoire? Le cessez-le-feu vient d'être signé. Lui était là-bas, il n'y a pas si longtemps. Quel supporter admiratif peut imaginer à cet instant que derrière le sourire du cycliste se cachent les souvenirs d'un appelé, qui au volant de son camion conduisait les légionnaires au combat?

    Ils avaient 20 ans. Ils ont fait la guerre d'Algérie

     26 mois difficile en Algérie  de Jean-Pierre Beltoise

    Quand les photographes mitraillent le visage heureux de Jean-Pierre Beltoise victorieux du Grand prix de Formule1 de Monaco en 1972, y en a-t-il un qui décèle dans son objectif, la colère que cet homme a emmagasinée contre l'armée qui lui a volé sa jeunesse en l'envoyant en Algérie?

    Qui, ne serait-ce qu'un instant, peut envisager que cet homme ceint de la couronne de lauriers, qui se plie à toutes les sollicitations des officiels, a refusé 13 ans auparavant d'obéir à l'autoritarisme stupide de ses supérieurs? "Des gars du FLN avaient attaqué notre poste, dit Beltoise, en passant par un champ de mines. Beaucoup sont morts, l'un d'eux blessé est resté accroché aux barbelés, dans le champ. Un sous-off m'a demandé d'aller le décrocher, j'ai refusé. C'est ce dont je suis le plus fier de cette guerre. Il m'a gueulé dessus, je n'ai pas cédé. Il a décidé d'y aller lui-même. Il a sauté sur une mine."

    Ils avaient 20 ans. Ils ont fait la guerre d'Algérie

    Et ces passants qui empruntent le pont de Bercy, en 1959, font-ils attention à ce couple d'amoureux, appuyé contre le parapet, qui regarde étrangement la Seine, comme si le fleuve était leur sauveur ?

     

    Ils avaient 20 ans. Ils ont fait la guerre d'Algérie

    C'est Jean-Claude Carrière et sa femme, qui s'apprêtent à jeter à l'eau, les lettres d'amour qu'ils se sont écrites chaque jour, pendant que le sergent Carrière faisait sa guerre en Algérie. Gommer les traces pour "tout effacer, tout oublier".

    Ils avaient 20 ans. Ils ont fait la guerre d'Algérie

    Le père Guy Gilbert le curé des loubards

    Le père Christian Gilbert celui qu'on appelle le curé des loubards, est arrivé à Alger avec le 2e bataillon des chasseurs alpins de Barcelonnette. "C'est en Algérie, dit-il que j'ai fait le plein de mes indignations qui m'animent aujourd'hui. C'est en Algérie que je me suis construit comme homme." C'est là en effet qu'il a sévèrement boxé un sergent qui passait à la gégène un jeune paysan algérien, ce qui lui valut d'être muté dans un bataillon disciplinaire.

    La France avait autre chose à faire que d'écouter à leur retour ces appelés, tout cabossés, qui lui renvoyaient l'image de sa propre défaite politique. La France voulait tourner la page. C'était les Trente glorieuses, la consommation valait mieux que l'introspection.

    L'Algérie est un marqueur de l'histoire de notre pays, un marqueur aussi pour chaque individu qui a traversé cette période, quelque soit son âge.

    Je n'avais pas dix ans, quand tout bronzé de retour des vacances en Corse je me rendais, début septembre, à l'école communale rue de Billancourt à Boulogne pour mon entrée en CM2. Brun, le cheveu frisé je devais ressembler aux mêmes enfants qui de l'autre coté de la Méditerranée faisaient eux aussi leur rentrée. Sur l'avenue, un camion s'est arrêté net à ma hauteur. Le chauffeur en est descendu et a hurlé en me coursant: "rentre chez toi sale bicot!"

    Pour qu'un adulte laisse tout à trac son véhicule au beau milieu de la route et pourchasse un enfant en l'abreuvant de propos racistes, il fallait que ce qui se passe alors en Algérie soit du sérieux. Ca l'était, en effet.

    Ces appelés devenus célèbres

    http://www.lepoint.fr/societe/ces-appeles-devenus-celebres-15-03-2012-1699480_23.php

    Témoignages sur la guerre d'Algérie. Ils furent happés par la guerre. Un livre leur donne la parole.

    Ils furent 1,5 million d'appelés. Dans "Ils avaient 20 ans" (Tallandier), Dominique Paganelli en a retrouvé une dizaine, célèbres, qui décrivent formidablement leur guerre, l'incorporation, la traversée, la vie quotidienne, les patrouilles, les combats... Certains sont devenus ministres comme Pierre Joxe ou Jacques Barrot, d'autres étaient déjà chanteurs comme Jacques Higelin ou Claude Vinci, qui raconte comment, vingt-quatre heures après sa folle désertion et avoir tiré (en vain) sur des légionnaires, il retrouvait ses amis Yves Montand et Simone Signoret pour écouter Juliette Gréco à Sainte-Maxime. Il y a des invités surprise comme Jean-Pierre Beltoise ou Raymond Poulidor, coureur déjà prometteur mais devenu chauffeur pour les légionnaires et effrayé par ces as de la guerre. Cinquante-cinq ans après cette guerre, ils tentent de briser ce silence, ces cauchemars que Jean-Claude Carrière illustre de la plus forte des manières : "A mon retour, avec ma femme, nous avons rassemblé les lettres que nous nous étions écrites chaque jour. Comme en procession, nous sommes allés au pont de Bercy et, là, nous les avons jetées dans la Seine pour tout oublier et tout effacer."

    EXTRAITS 

    Comment Cabu est devenu antimilitariste

    Ils avaient 20 ans. Ils ont fait la guerre d'Algérie

    "Nous devons décharger de grosses nourrices d'eau indispensables à la vie de tous les jours, que nous hissons difficilement sur une épaule, puis quelques mètres plus loin sur l'autre pour répartir la douleur. Tout le monde est mobilisé et il faut plusieurs allers-retours en pleine chaleur pour vider l'hélico. Après, c'est nous qui sommes vidés. Cette corvée, fatigante et dangereuse, c'est notre hantise.Le chemin est protégé par des gars en armes, mais nous ne pouvons nous empêcher de penser qu'avec nos lourdes bourriches sur le dos, nous sommes une cible facile pour des tireurs embusqués. Comme le colonel nous a assuré qu'aucun hélico ne peut se poser plus près de notre campement, et que l'eau est vitale, alors va pour la corvée. Ça me fait drôle de voir tous ces gars dont l'alcool imbibe la vie suer sang et eau pour transporter ces jerricans. Et un jour, à l'occasion du départ du colonel, je crois, on a vu un petit hélico se poser tout près de notre poste. En descend un troufion qui porte un seau à glace duquel dépasse une bouteille de champagne. Le jeune marche de façon martiale comme s'il rendait les honneurs au champagne que doit déguster l'officier. J'ai trouvé ça abject..."

    Poupou chauffeur routier ! 

    Ils avaient 20 ans. Ils ont fait la guerre d'Algérie

    "Les appelés sont mis à contribution. Raymond Poulidor est de ceux-là. Le 28 septembre, jour du référendum, il a été détaché pour aller chercher dans les mechtas les hommes et les femmes (c'est la première fois que les Algériens votent) afin qu'ils exercent leur "devoir de citoyen". Ceux qui n'avaient aucune envie de se déplacer, ou qui ne voulaient pas quitter leur village parce qu'ils ne savaient pas de quoi il s'agissait, on les ramenait de force. La plupart ne savait ni lire ni écrire, certains mêmes n'étaient jamais montés en voiture ni dans un camion comme le mien. Durant le trajet, ils étaient malades, ils vomissaient. Il fallait nettoyer. Arrivés devant les bureaux de vote, on leur indiquait le bon bulletin à glisser dans l'urne, le blanc, celui du oui. Ils ne prenaient pas le bulletin violet, celui du non, d'autant que cette couleur est associée à la mort chez les musulmans."

    Le colonel skieur

    Ils avaient 20 ans. Ils ont fait la guerre d'Algérie

    En pleine guerre, le colonel du régiment de Jean-Claude Carrière a décidé de dévaler, à skis, les pentes enneigées des montagnes du Djurdjura. "Arrivé au pied de la montagne, il faut installer deux hommes de garde auprès des véhicules, avec des fusées d'alarme (c'est le règlement), et continuer à pied jusqu'à la neige. Un soldat porte sur son épaule les skis du colonel, un autre les bâtons. On garde un oeil inquiet sur le paysage. Le colonel s'avance en tête, le pistolet à la ceinture. Des bouffées de buée le précèdent.

    Il parvient à l'endroit qu'il a choisi, qu'il commence à connaître. Pendant qu'il attache ses skis, qu'il saisit ses bâtons, je dispose les hommes le long de la piste qui n'existe pas, dans la neige vierge. Placés de cinquante mètres en cinquante mètres, ils tiennent leurs armes braquées sur la montagne silencieuse. Ils tournent le dos à la piste. Le canon des armes tremble de froid.

    Quand tout est prêt, quand toutes les dispositions sont prises (comme on dit), je fais un signal et le colonel s'élance pour une petite descente tranquille. Il descend correctement, un peu raide, sans se presser, gardé par des soldats postés, immobiles, qui surveillent avec attention les abords au cas où. Parvenu au bas de la piste, il remonte lentement, puis il redescend. Il recommence encore une fois ou deux. Quelquefois, quand le souffle lui manque un peu, il ne remonte pas jusqu'en haut. Une fois, il est tombé. Dans ces cas-là, il ne faut pas lui porter secours, sauf blessure. Il est important de ne pas quitter son poste. Le colonel, d'ailleurs, se relève tout seul. Rien de grave. Il repart en douceur.

    Ça dure une heure, une heure et demie. Quand il en a assez, je regroupe les hommes. Ils ont généralement eu très froid, et moi aussi, tandis que le colonel est tout rouge et transpire presque."

     

    Tuer un âne... de peur 

     Ils avaient 20 ans. Ils ont fait la guerre d'Algérie

    "La nuit , raconte Jean-Pierre Farkas [journaliste à RTL,Paris Match...], tous les bruits sont interprétés à l'aune de sa propre peur. Le vent qui agite les arbres, ce sont des assaillants cachés qui s'apprêtent à donner l'assaut et fondre spécialement sur le poste de garde. Un bruit suspect sur le sol, alors que tout le monde dort, c'est forcément l'ennemi qui se déploie. Et au petit matin quand la sentinelle s'aperçoit que ce n'est rien de tout ça, mais seulement une vache qui divague, ça ne lui arrache même pas un sourire.

    Parfois le gars qui faisait le tour de garde de 2 heures à 4 heures restait avec moi deux heures supplémentaires, dit Farkas. Chacun conjure la peur comme il peut. Il était agriculteur et me parlait de tracteur, moi je l'écoutais. En tout cas, nous n'étions pas seuls face à la nuit.

    Il nous est arrivé un jour de tuer un âne... de peur. On a dû croire que c'était un terrible combattant qui nous en voulait. C'est mon seul fait d'armes." (...).

    Ils avaient 20 ans. Ils ont fait la guerre d'Algérie

    Claude Vinci – quatre ans déjà

    Déjà plus de quatre ans depuis la mort du chanteur et compositeur Claude Vinci.

    Sa disparition n’est pas passée sous silence – sa gentillesse, son acharnement et son sens critique nous manquent aujourd’hui.

    Il a connu le succès dans les années 60 et 70. Amateur de foot et déserteur de la guerre d’Algérie, il a entre autres interprété en chansons Paul Éluard et Aragon.

     

    Le tac-tac-tac des cigognes

    Le 5e génie de Claude Vinci s'est arrêté quelques jours dans une ferme viticole, près de Fondouk. Sa section est désignée pour monter la garde aux trois postes décidés par les officiers. Comme il est caporal-chef, il doit montrer l'exemple, il prendra son tour de garde comme tout le monde. Il est au poste du château d'eau de la ferme. La nuit a été calme, mais au lever du soleil Vinci entend claquer de violentes rafales de mitraillette ou de fusil-mitrailleur. "J'avoue que je ne fais pas la différence. C'est la panique. Que dois-je faire ? Je sors complètement affolé dans la cour. J'aperçois un Algérien enturbanné, le fusil de chasse à l'épaule, s'avancer vers moi. Ça y est ! La voilà, la situation tant redoutée. Me trouver face à face avec un Algérien, chacun une arme à la main. Tuer pour ne pas être tué ? Je suis pétrifié, incapable du moindre geste. L'homme s'avance vers moi et me tend la main. Je ne comprends pas. Mécaniquement je lui serre la main. J'essaie de reprendre un semblant de contenance et je lui demande s'il a entendu les rafales de mitrailleuse. Un sourire éclaire son visage. "N'ayez pas peur, me dit-il, ce ne sont que les cigognes qui ont leur nid en haut du château d'eau. Tous les matins au lever du soleil elles font claquer leur bec. C'est tout. C'est ce que vous avez pris pour des rafales de mitraillette.""

    Paras : pour ou contre ? 

    "Nous ne sommes pour eux que de la basse viande, dit Jean-Claude Carrière. Même dans les opérations d'ensemble, ils ne se battent pas aux côtés de n'importe qui. Ils choisissent leur terrain, ils ne sautent pas à n'importe quelle heure. De temps à autre, on les voit surgir de la poussière dans un cortège de véhicules camouflés et se répandre dans la ville.

    Super-élégants (les parachutistes sont les dictateurs de l'élégance de la gent militaire, on ne discute pas leur mode), le jarret nerveux, le cheveu ras, le regard fier et lointain, médaillés, des gourmettes en or, le treillis retaillé, aussi plaqué au corps que possible, la ceinture portée large, les manches retroussées mais qui s'arrêtent juste à la hauteur du coude (sinon ça fait plouc), ils vont méprisant les vitrines, certains marchent par couples et se tiennent le petit doigt, quelquefois ils achètent du dentifrice ou sucent des glaces. Ils savent qu'on les regarde et ils aiment ça."

    Le caporal-chef du 8e RPC Gilles Perrault les a connus de l'intérieur. Il en était de cette noblesse. "Nous avions pour les officiers para une estime qui n'existait pas ailleurs. A l'inverse, il y avait une simplicité de relation entre l'officier para et ses hommes. Ils ne cherchaient jamais à nous donner l'impression qu'ils étaient d'une autre race. A l'époque, l'ambiance para était réelle et c'était même l'une des raisons principales des succès opérationnels remportés par ces unités."

    Le terrible silence... 

    "Oui, ça a été le grand silence, dit Jean-Pierre Farkas. Cette guerre a laissé des traces à l'âme, au coeur, à la mémoire. Ces jeunes de 20 ans qui sont restés vingt mois, voire vingt-huit pour certains, sans voir de femmes, si ce ne sont celles des bordels, il n'est pas possible qu'ils soient rentrés chez eux avec un comportement innocent. Oui, ça a été le grand silence. Moi, c'est vrai, je n'ai rien dit. Mais on ne m'a rien demandé. Pourtant, ça m'aurait soulagé, mais était-ce utile ? Je n'en ai parlé qu'avec ma fille qui avait 8 ans. La guerre de 14-18, on en discutait dans les familles. Le grand-père qui avait fait Verdun, et dont on avait accroché le cadre et les médailles au salon, était un héros. Comme ceux de 39-45, ceux qui s'étaient engagés aux côtés de Leclerc, de De Gaulle, les résistants au maquis, qui ont repoussé l'envahisseur allemand. Mais, pour notre guerre, celle dont on taisait le nom, les Français sentaient intuitivement qu'elle n'était pas légitime, pas juste, qu'elle n'aurait pas dû être. Notre guerre à nous, c'est une guerre qui pue. Récemment, je me suis retrouvé avec des copains qui comme moi étaient en Algérie. Je leur ai demandé si durant tout ce temps, là-bas, ils avaient vécu quelque chose d'indicible, dont ils ne s'étaient ouverts à personne. Chacun à son tour a répondu : "Evidement, nous avons tous vécu une horreur." J'ai poursuivi, sans leur demander de quoi il s'agissait, pour savoir si aujourd'hui, après toutes ces années, ils se sentaient enfin prêts à en parler. Ils m'ont répondu : "Non. Jamais nous n'en parlerons.""

    Raymond Poulidor "Inutile de vous dire que durant mes douze mois algériens je n'ai pas fait de vélo."

    Jean-Pierre Farkas : "Il nous est arrivé un jour de tuer un âne... de peur. On a dû croire que c'était un terrible combattant qui nous en voulait. C'est mon seul fait d'armes."

    « Lorsqu’un article de mon blog mis en ligne le 1er décembre 2011 (lien ci-après) fait réagir Mme Françoise MARCHANDGuerre d’Algérie. Ils témoignent pour une mémoire apaisée *** MISE A JOUR D'UN LONG COMMENTAIRE »

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