• Bernard Dravet, l'Aubagnais qui refusait de torturer *** MISE A JOUR : Le lien pour le deuxième article

    Aubagne 

    Appelé à la guerre d'Algérie à 20 ans, il raconte

     son combat dans un livre

     

    Bernard Dravet, l'Aubagnais qui refusait de torturer

    Bernard Dravet avait 20 ans lorsqu'il est parti pour le front en Algérie. Poussé par ses proches, il s'est enfin décidé à écrire sur cette expérience traumatisante. Photo C.M.

    SOURCE : http://www.laprovence.com/article/edition-aubagne/3002478/bernard-dravet-laubagnais-qui-refusait-de-torturer.html 

    C'était un interrogatoire, un cadre un FLN qui ne parlait pas. On m'a demandé d'y aller et d'utiliser la gégène pour l'électrocuter."

    Bernard Dravet n'a pas encore 21 ans lorsqu'il est confronté pour la première fois à une séance de torture dans une des cellules du poste de commandement de Mila, dans l'Est du pays. "J'ai refusé tout simplement", assure celui qui, aujourd'hui, a rassemblé son courage et ses souvenirs pour consigner cette expérience dans un livre : "J'avais vingt ans dans la guerre d'Algérie" (voir encadré), raconte son combat pour refuser ce qui va à l'encontre de ses convictions.

    Pour Bernard, le poste à la cellule de renseignements est déjà son deuxième, en Algérie. Dès le service militaire, opposé à la guerre qui a commencé quelques années plus tôt, et membre actif des comités pour la paix, il est repéré pour ses prises de position par sa hiérarchie. "Je suis donc sorti parmi les derniers avec les pires postes en Algérie", explique Bernard Dravet. Lorsque les premiers du classement vont en Allemagne garder la zone démilitarisée, lui, et les derniers de la liste donc, sont affectés sur le front Algérie.

    "C'est moi qui commande !" 

    Tranquillement installé à la terrasse d'un bistrot du centre-ville d'Aubagne, il n'a pas besoin de faire beaucoup d'efforts pour se remémorer cette période de sa vie. "J'ai toujours tout écrit, aussi bien dans un carnet que dans des lettres à mes amis, explique-t-il. C'est la démarche de me lancer dans ce livre qui a été difficile, après c'est allé tout seul." Lorsqu'il parle, le ton est posé et clair, le regard au loin, il revoit les images de son arrivée en Algérie. C'est en 1958 et la guerre a déjà commencé. Bernard est alors inquiet mais il croit que son départ peut être utile. "Je pensais pouvoir être plus servir la cause de la paix plus efficacement là-bas qu'en restant en France à militer. Je n'ai pas été déçu..."

    À son arrivée en Algérie il est affecté à un poste en altitude, sur la ligne de front. Il a sous ses ordres une section d'appelés. Très vite, un premier soldat français de la section est tué par le FLN, le reste de la troupe veut se venger. "Dès le premier village rencontré, ils ont commencé à tout saccager, frapper les gens, toucher les femmes. Je suis resté sonné, puis je leur ai hurlé "C'est moi qui commande !". Je ne sais pas où j'ai trouvé cette force, mais ça a réussi a les contenir." Malgré l'hostilité de son capitaine, il tient bon sur ses principes. "Je suis chrétien par mon éducation, d'obédience jésuite. Et en tant qu'être humain mes convictions m'interdisaient d'agir de la sorte, même quand il ne s'agit que de "laisser faire", ou d'obéir aux ordres", explique Bernard Dravet qui assure aujourd'hui avoir perdu la foi pendant cette guerre.

    Après cette expérience il est muté aux renseignements, au poste de commandement de Mila, dans l'est algérien, "pour m'impliquer, m'obliger à me mouiller en participant aux exactions". Ce qu'il refuse, toujours, noircissant ses cahiers de notes pour ne jamais oublier. Il écrit beaucoup de lettres, à ses proches, mais aussi aux généraux pour leur faire part de son désaccord avec ce qu'il voit, ce dont il refuse de faire partie.

    Bernard Dravet se trouve assez vite des amis sur lesquels s'appuyer et qui, comme lui, sont révoltés par ce côté sombre de la guerre. "Un avocat, un jésuite, un paysan et un aumônier, résume-t-il. Ensemble, nous avons pu nous soutenir et faire remonter nos témoignages." Il rencontre aussi un élève prometteur de l'ENA, Michel Rocard, futur premier ministre. "Il rédigeait un rapport sur les camps de regroupement et s'indignait de la façon dont l'armée traitait les Algériens nous avons donc pu échanger", se souvient Bernard Dravet, qui lui demandera de préfacer son livre.

    Les Harkis, puis le putsch 

    Muté à la tête d'une section de harkis, Bernard refusera l'ordre d'exécuter 5 civils en représailles de la désertion de certains de ses soldats. "Catégoriquement. Je leur ai juste dit que je ne le ferai pas", explique froidement Bernard, finissant son café. Les cinq hommes auront la vie sauve, Bernard Dravet lui, en a fini avec cette guerre. Il est finalement rapatrié, non sans avoir été décoré en public à l'ordre de la Brigade pour son courage et ses "faits d'arme". Il n'est pas dupe : "j'ai bien senti qu'il s'agissait surtout de me dissuader de parler à mon retour".

    Revenu dans la métropole, il organise avec ses amis des rencontres entre appelés qui partent au front pour les prévenir de ce qui les attend. "Sur place c'est très difficile quand ça vous tombe dessus, il vaut mieux être préparé", résume Bernard.

    Sentant venir le putsch de généraux alors que la fin de la guerre se profile, il préviendra aussi en ce sens les appelés qui réussiront à faire échouer la tentative de coup d'état. "Ne pas obéir sans réfléchir à tous les ordres, voilà ce qui est important", conclut Bernard. Comme un avertissement.

    Clément Mathis

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    Nous avions déjà parlé de Bernard Dravet dans un autre article, vous pouvez le retrouver en cliquant sur le lien ci-dessous :

    http://www.dandelotmije.com/article-le-livre-de-bernard-dravet-est-un-temoignage-sur-la-guerre-d-algerie-entre-1958-et-1960-pour-la-pr-121894873.html

     

     

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