• RAPPELEZ-VOUS : nous avions présenté cet article, aujourd'hui André Théret nous autorise de mettre en ligne sa lettre qu'il avait envoyée au ministre de la Défense

     

    RAPPELEZ-VOUS : nous avions signalé

    cette information

    Aujourd'hui André Théret nous autorise de mettre

    en ligne sa lettre qu'il avait envoyée

    au ministre de la Défense

    RAPPELEZ-VOUS ; nous avions présenté cet article, aujourd'hui André Théret nous autorise de mettre en ligne sa lettre qu'il avait envoyée au ministre de la Défense

    Un ancien combattant d’Algérie rend sa décoration à M. Le Drian 

    André Théret, 80 ans, proteste contre « l’esprit guerrier » du gouvernement. Pour lui, c’est autrement qu’il faut lutter contre le terrorisme.

    Il s’appelle André Théret et a renvoyé à Monsieur Le Drian, ministre de la défense, la décoration (Croix de la valeur militaire) qu’il avait reçue pour une action qu’il avait conduite pendant la guerre d’Algérie. Il était alors sous-lieutenant et servait dans l’aviation. Aujourd’hui âgé de 80 ans il est retiré à Wignicourt, une toute petite commune des Ardennes.

    Il était enseignant quand, en 1958, il a été appelé pour effectuer son service militaire et dans ces circonstances participer aux opérations de « Maintien de l’ordre » en Algérie. Eh non, on ne désignait pas cela par le nom de guerre !

    Pourtant André Théret a été confronté à la réalité de ce qui se passait là-bas. Il a notamment vu les effets du napalm utilisé par l’armée française en violation des accords signés. S’il n’a pas été témoin de la torture il a eu à convoyer des suspects qui allaient être interrogés. Il a eu aussi l’occasion de ramener en hélicoptère les corps de soldats tués au cours d’accrochages.

    Il conteste la politique guerrière conduite aujourd’hui par la France au nom de la lutte contre le terrorisme. Le déploiement de militaires en uniformes dans les lieux publics a pour effet d’entretenir l’illusion de mesures sécuritaires. Ce n’est certainement pas efficace pour l’objectif affiché. Mais peut-être le but véritable est de redorer le blason terni de ceux qui soutiennent la politique du pouvoir ?

    Notre ancien d’Algérie porte un regard critique sur les hommes politiques qui l’avaient amené à se trouver mobilisé pour une guerre qu’on a fini par reconnaître comme étant de « décolonisation ». Je dirais plus clairement qu’elle avait pour but de maintenir l’ordre colonial ! Dans ce cadre Guy Mollet, qui est mort dans son lit souligne-t-il, est mis en accusation. André Théret reproche à ses héritiers spirituels d’être engagés dans la même voie !

    Le journal Le Monde a publié dans son édition du 31 décembre un article rendant compte de la décision de cet ancien d’Algérie de renvoyer sa décoration et d’en expliciter les raisons.

    Jacques CROS

    *********************************************************************************

    DEUX REMARQUES PERSONNELLES

    M. Théret, j’ai lu avec attention votre lettre adressée au ministre de la Défense, vous dites que les hommes politiques rendent hommage aux anciens combattants de la guerre d’Algérie le 11 novembre et le 5 décembre, sur ce point je suis obligé de vous rappeler que la loi du 6 décembre 2012 a fait du 19 mars 1962 la date officielle (chaque 19 mars) de la commémoration des victimes de la guerre d’Algérie, même si le 5 décembre n’a jamais été abrogé par le président «  du changement c’est jamais » Vous venez de m'informer que la date du 19 mars est un oubli de votre part, dont acte.

    D’autre part en respect au droit fondamental de la liberté d'expression, bien que certains de vos propos soient contraires à mes convictions anti colonialistes, j'accepte  en l'état l'ensemble de votre lettre.

    Michel Dandelot

    *********************************************************************************** 

     

     

    André THERET                                                                Le 2 décembre  2015

    Le Moulin

    08270 WIGNICOURT

    andre.theret08@orange.fr

                                                                             Monsieur  Jean-Yves LE DRIAN

                                                                                         Ministre de la défense

                                                                                         14, rue Saint Dominique

    Objet: Croix de la valeur militaire                              75007 PARIS

               en retour.

     

    Monsieur le Ministre,

     

    Je vous renvoie la citation avec attribution de la croix de la valeur militaire qui m'avait été remise le 30 mai 1960. Comme vous le savez, cette croix  a été créée par décret du 30 avril 1956 pour récompenser les "actions d'éclat" lors des évènements d'Algérie. Elle servait de substitut à la croix de guerre qui ne pouvait être attribuée puisqu'il n'y avait officiellement pas de guerre. J'y faisais du "maintien de l'ordre"…avec du napalm!

    Il aurait fallu, en 1999, lors de la reconnaissance officielle de l'état de guerre en Algérie, attribuer  la croix de guerre aux militaires qui s'étaient vu remettre la croix de la valeur militaire. Symboliquement, cela aurait signifié qu'ils avaient combattu au service de la France, comme ceux de 1914-1918, comme ceux de 1940-1945. J'aurais apprécié ce geste.

    Cet abandon de décoration est, pour moi,  un acte grave, je vous prie de le croire.

    J'ai beaucoup réfléchi avant de passer à l'acte. Je souhaite donc vous donner les raisons de ma décision, prise au retour de la cérémonie du 11 novembre 2015 où j'ai entendu lire le message du Secrétaire d'Etat aux anciens combattants.

    Je vous prie de m'excuser pour la longueur de ce courrier, mais vous n'êtes pas obligé de le lire. Ce n'est pas un document officiel. Je ne suis qu'un simple citoyen.

    A la demande du gouvernement, j'ai servi mon pays, la France, en Algérie.

    Je viens d'avoir 80 ans. Né en 1935, j'ai donc fait partie des classes qui ont fait la guerre d'Algérie. Comme plus de deux millions de jeunes français, j'ai répondu à l'appel de mon Pays, en février 1958.  Je quittais ma famille, pour plus de deux ans. J'abandonnais mon travail d'enseignant spécialisé titulaire. Je n'ai perdu que 18 mois de salaire car, par la suite,  j'ai perçu une solde de sous-lieutenant. Mes camarades de combat ont, eux, perdu 30 mois de salaire.

    Nommé officier de réserve de l'Armée de l'Air, j'ai été muté en Algérie.

    L'Armée de l'Air en Algérie manquait  de personnel. Après une courte formation, j'ai été affecté dans un PCA (Poste de Commandement Air). En fait, j'ai assuré sur le terrain, avec les troupes au sol, les fonctions de responsable de PGA (Poste de Guidage Avancé)

    C'était normalement une fonction tenue par un pilote. Mais il n'y avait pas assez de pilotes et ils préféraient tous voler plutôt que de "crapahuter" avec les troupes au sol.

    Mon travail consistait, en liaison avec les commandants des unités terrestres, à mettre en œuvre les moyens aériens dont je disposais localement (escadrille de T6, alouette) et ceux que je devais faire venir et guider, la chasse lourde par exemple. J'étais aussi responsable du balisage des cibles, par fumigène. Les évacuations sanitaires pouvaient aussi faire partie de mon travail.

    C'était une "vraie" guerre: 25 000 jeunes français dont une majorité d'appelés y ont perdu la vie. J'ai fait mettre "hors de combat", comme dit ma citation, des rebelles lors des nombreuses opérations auxquelles j'ai participé. Quand j'avais du  faire intervenir les avions de la chasse lourde armés de "Bravo Sierra," le code radio pour les bidons spéciaux, le napalm, je savais, en allant aux résultats en fin d'opération, qui était en partie responsable des conséquences de l'intervention. Un mort par balles ne peut être confondu avec un mort brûlé.

    Moralement, ce n'était pas des moments faciles à vivre. Je savais, par exemple, que l'emploi du napalm était interdit par les conventions internationales. Il m'était interdit de prononcer ce mot à la radio. La guerre d'Algérie, c'est la guerre des tabous.

    Mais je répondais par la violence à l'horreur. En allant rechercher en hélico les corps de camarades tombés dans une embuscade, j'ai constaté que "le sourire kabyle", la gorge tranchée avec les testicules fourrés dans la plaie, ce n'était pas une légende.

    Je n'ai pas participé à des actes de torture mais il m'est arrivé, en cours d'opération, de transporter avec l'hélico des "colis," c'était le terme utilisé pour désigner les rebelles capturés.

    Je les remettais dans les mains des gendarmes du DOP, le Détachement Opérationnel de Protection. Comme tous les appelés, je savais…

    Tous les dirigeants politiques, de Guy MOLLET en 1956 au Général de GAULLE en 1958 m'ont dit que je me battais pour défendre les intérêts de la France.

    Pour me le prouver, on m'a fait visiter, le 11 mars 1959, avec un groupe d'officiers, les installations du champ pétrolier d'Hassi Messaoud. Ces visites avaient pour but de remonter le moral des officiers qui s'interrogeaient sur l'évolution de cette guerre et son épilogue. La  lutte pour le maintien de l'indépendance énergétique de la France constituait une réelle motivation.

    Tous les dirigeants  politiques de l'époque ont couvert "les évènements", l'emploi du napalm, la disparition des "colis", la torture.

    Aujourd'hui, 60 ans après, la classe politique a "oublié" ce qu'elle a fait à l'époque.

    La notion de permanence des principes lui est étrangère, le PS de 2015 ignore celui de 1956.

    Depuis plusieurs décennies, à travers les livres et les articles de journaux sur la guerre d'Algérie, je constate que les hommes politiques tentent de se défausser de leurs responsabilités.

    Ils jouent un double jeu. D'une part, ils rendent hommage aux anciens combattants de la guerre d'Algérie, le 11 novembre, le 5 décembre. D'autre part, ils prennent des mesures et tiennent des discours qui témoignent de leur souhait de "ne pas tremper" dans les eaux troubles de cette "guerre sans nom", de cette "sale guerre". Que les anciens combattants se débrouillent avec cette période sombre de l'histoire de France…

    Parmi tous les faits qui  prouvent ce double langage, je vais vous en citer quatre : 

    1) L'ancien secrétaire d'Etat aux anciens combattants, Monsieur Kader ARIF, a pris le 24 septembre 2013 un décret qui réduisait de 20% la participation de l'Etat à la retraite mutualiste des anciens combattants. Cette mesure impactait environ 400 000 anciens combattants, essentiellement ceux ayant combattu en Algérie.

    Le gouvernement a battu en retraite, sous la pression des parlementaires et en particulier de la députée des Ardennes que j'avais alertée. Par décret du 27 décembre 2013, il a rétabli le taux initial avec effet au Ier janvier 2014.

    Je n'aurais perdu qu'une cinquantaine d'euros par an. Ce n'est rien, financièrement par rapport aux 18 mois de salaire perdus à 25 ans, mais, moralement, ce fut un rude coup sur ma tête.

    2) Le dimanche 18 octobre 2015, j'ai vu à 20h30 sur la chaîne "LCP Public Sénat" un documentaire de Jean-Michel MEURICE et Benjamin STORA intitulé "Algérie, notre histoire." Un débat a suivi, au cours duquel une journaliste a conclu  en disant que nous avions  fait en Algérie "une guerre inutile et honteuse." Personne n'a réagi.

    Il s'agit pourtant d'une chaîne publique, d'une chaîne parlementaire. 

    J'ai très mal dormi cette nuit-là. Impossible de chasser de ma tête les images de corps brûlés.

    3) Dans le journal "Le Monde" du jeudi 5 novembre 2015 j'ai lu, sur une demi page, un article de Amir AKEF nous informant de la mort de Madame Claudine CHAULET.

    Le titre est explicite "Claudine CHAULET Militante de la cause algérienne."

    Le journaliste écrit que la nouvelle de sa mort a provoqué une grande émotion en Algérie où des hommages spontanés lui ont été rendus. Claudine CHAULET, avec son mari Pierre, avait  le droit, sur le plan idéologique, de militer pour l'indépendance de l'Algérie. D'autres l'ont fait, y compris en France, en particulier les signataires du manifeste des 121.

    Mais Claudine CHAULET, d'origine européenne, de culture française, avec un père officier de gendarmerie et une mère enseignante, prêtera allégeance aux chefs du FLN dès septembre 1955. Elle accomplira de nombreuses missions pour eux. La plus importante sera l'exfiltration d'Abane RAMDANE caché dans la casbah d'Alger quadrillée par les paras.

    Il était à la fois le théoricien du FLN et l'organisateur des pires attentats contre les européens et les forces de l'ordre. Il fut aussi cruel contre les musulmans en décidant, entre autres, le massacre de plus de 300 civils à Mélouza. 

    Claudine CHAULET a été, les faits sont implacables, la complice de terroristes qui ont beaucoup de sang sur les mains. Pourquoi le silence sur ces aspects de la personnalité de Madame CHAULET. Pourquoi le silence des associations d'anciens combattants sur cet article partisan paru dans un grand quotidien français ?

    4) Le 11 novembre 2015, comme chaque année, j'ai assisté à la cérémonie aux monuments aux morts de mon village. Le message du Secrétaire d'Etat aux anciens combattants a été lu. J'ai entendu les mots "guerres de décolonisation". Je ne pouvais pas le croire. Le maire m'a donné une copie de ce message.

    Il est écrit: "Tous les morts "pour la France", hier dans la grande guerre, dans la seconde guerre mondiale, dans les guerres de décolonisation, aujourd'hui dans les opérations extérieures, sont désormais réunis dans le souvenir et l'hommage de la nation."

    Que les dirigeants algériens disent que l'ALN, l'Armée de Libération Nationale, a fait une guerre de décolonisation, c'est normal. Mais je n'admets pas qu'un ministre français laisse penser la même chose de l'Armée de son pays.  Comme deux millions de jeunes français, j'ai fait, en 1959 et en 1960 en ce qui me concerne, à la demande des représentants du peuple français, une guerre pour la défense des intérêts de la France. En 1954, l'Algérie, c'était la France. Aucun homme politique français, de gauche ou de droite, ne m'a dit que j'allais y combattre pour maintenir un état de colonisation. J'aurais refusé d'aller faire cette guerre-là.

    Je peux admettre que des historiens disent aujourd'hui, avec le recul, que c'était une guerre inutile. J'ai pensé comme eu, dans les années 1990, lorsque la guerre civile en Algérie a fait plus de 500 000 morts.

    Je peux admettre qu'ils disent aujourd'hui, 60 ans plus tard, hors du contexte des horreurs vécues par les soldats en Algérie, que la torture n'était pas une réponse au terrorisme.

    Je leur demande seulement de bien situer les responsabilités. Ce ne sont pas les deux millions d'appelés qui ont décidé de faire la guerre. Ce sont les hommes politiques, des socialistes.

    Monsieur le Secrétaire d'Etat est leur héritier spirituel. Il est né une vingtaine d'années après moi. A 20 ans, comme moi, il était instituteur. Mais lui, il a eu l'immense chance de ne pas faire une guerre qu'il qualifie de "guerre de décolonisation". Je veux lui dire qu'avec ce terme, il a ajouté de la souffrance à celle que je vis chaque fois que les images de la guerre d'Algérie remontent dans ma mémoire. Il aurait pu, il aurait du, dans son message, ne pas employer des mots qui stigmatisent les anciens combattants d'Algérie.

    Il suffisait qu'il dise: " dans la guerre d'Indochine, dans la guerre d'Algérie."

    Je ne peux admettre que les responsables politiques, ceux qui ont envoyé le contingent en Algérie, fassent porter à l'armée française, me fasse porter, tout le poids de cette guerre.

    J'étais un civil, j'étais un enseignant, je n'étais pas fait pour tuer. J'ai tué à cause d'eux.

    J'ai donc décidé de passer à l'acte, de vous rendre la croix de la valeur militaire qui m'a été attribuée le 30 mai 1960.

    J'ai estimé que je devais le faire pour nos morts en Algérie, pour les 25 000 jeunes français de métropole. Je le fais pour tous mes compagnons d'armes, des milliers, qui, après la guerre d'Algérie ont passé leur vie dans les hôpitaux psychiatriques. Un sujet tabou en France ! 

    Je le fais aussi pour les 70 000 harkis honteusement abandonnés par la France, au plus haut niveau de l'Etat, et cruellement exterminés, avec leur famille, par le FLN.

    Je n'oublie pas, je n'oublierai jamais, que le 18 juin 1959, c'est la harka de Zaafrane, une vingtaine de harkis à cheval, qui a probablement sauvé la vie de mon radio et la mienne.

    Comme lui, il me l'a dit après, j'ai eu peur, sur le moment, de finir avec le sourire kabyle.

    L'analyse du passé doit nous servir pour éviter, en 2015, de nouvelles erreurs.

    En 1962, nous avons perdu la guerre d'Algérie.

    Et pourtant, nous étions près de 600 000 soldats présents, en même temps, sur le sol algérien, soit deux fois les effectifs actuels de l'armée française.

    Et pourtant, nous avons employé les grands moyens, le napalm par exemple.

    Et pourtant, l'armée avait pratiquement tous les pouvoirs. C'était le régime des "pouvoirs spéciaux" votés le 12 mars 1956 par 455 députés, dont les députés communistes.

    Et pourtant, les méthodes utilisées étaient expéditives. Pendant la guerre d'Algérie, les 2000 suspects qui ont aujourd'hui une fiche "S" n'auraient pas survécu. Ils auraient tous fini rapidement comme "colis", comme les 3000 disparus pendant la bataille d'Alger.

    Et pourtant, il n'y avait pas de kamikazes en face de nous. Les poseurs de bombes, souvent des femmes, dissimulaient leurs engins de mort dans les cafés et s'éclipsaient discrètement.

    Et pourtant la société française était solide. Elle sortait de la deuxième guerre mondiale, elle a accepté le départ à la guerre de plus de 2 millions de ses enfants. Elle a accepté la mort de 25 000 d'entre eux. Elle a accepté la mort  en métropole de plus de 3000 victimes civiles, dont une majorité de musulmans, lors des attentats terroristes.

    Et pourtant, la France était en croissance économique, à l'aube des "trente glorieuses."

    Combien de familles françaises accepteraient de vivre  aujourd'hui ce que leurs parents ont vécu ? Je souhaiterais que des sociologues répondent. Ils sont silencieux…

    Aujourd'hui, je vois des jeunes brandir des pancartes "Même pas peur." Ils ont plus de courage que nous en Algérie. Une petite différence : eux, ils n'ont pas à prouver leur courage !

    Je pense, mais je n'ai l'expérience que d'une seule guerre contre le terrorisme, que l'option militaire ne peut constituer une solution à long terme dans ce type de conflit asymétrique.

    L'histoire moderne fourmille d'exemples. Les gens de mon âge peuvent en témoigner.

    Comme nous en Indochine et en Algérie, les américains ont perdu au Vietnam, en Afghanistan et  en Irak. Les russes ont perdu aussi en Afghanistan. On ne gagne jamais quand on veut faire une guerre "traditionnelle" contre le terrorisme, quelles que soient ses causes.

    Notre société actuelle a peut-être besoin de plus de militaires, de gendarmes, de policiers, de douaniers. Elle a surtout besoin d'une meilleure utilisation des moyens actuels. Tous les militaires en uniforme qui déambulent dans les lieux publics à Paris, dans les gares, ne servent à rien sur le plan technique. C'est une sécurité de façade. Tous les appelés apprenaient un principe de base: "voir sans être vu."  Dans la lutte contre le terrorisme, c'est essentiel.

    Il faut multiplier le nombre de policiers, de gendarmes, de militaires en tenue civile, armés.

    Mais cette discrétion, utile pour la sécurité, ne permet pas de remonter dans les sondages. 

    La population est rassurée quand elle voit des uniformes, mais on peut mourir "rassuré."

    Il faut donc l'éduquer, lui expliquer que la protection invisible est la plus efficace.

    Mais notre société a surtout besoin de philosophes,  de sociologues, d'économistes. Je ne les entends pas. Je n'entends que les "experts" militaires qui se répandent dans les médias.

    Le 6 septembre 1960, 121 intellectuels s'étaient opposés à la guerre en signant un manifeste pour le droit à l'indépendance de l'Algérie. L'histoire leur a donné raison…

    Où sont les intellectuels aujourd'hui ? Leur silence est aussi inquiétant que le bruit des armes.

    On dépense beaucoup d'efforts et d'argent pour traiter les conséquences du terrorisme. Il faudrait en dépenser aussi pour en étudier et en traiter les causes.  

    Je suis inquiet pour mon pays, le pays que j'ai servi au mieux, comme militaire, comme civil.

    Je revis aujourd'hui, à 80 ans, ce que j'ai vécu à 20 ans, en 1956. Je suis inquiet.

    A l'époque, j'ai vu le Président du Conseil, Guy MOLLET, se transformer en chef de guerre. 

    Il a envoyé le contingent à la guerre, il m'a envoyé à la guerre. Une guerre gagnée sur le plan militaire mais perdue sur le plan politique, au niveau international.

    Mais lui, il est mort dans son lit. Il a de rues et des places à son nom. C'est en France !

    Aujourd'hui, je vois le Président de la République suivre le même chemin, prendre la tête d'une coalition militaire pour abattre l'Etat Islamique. C'est une sorte d'état kamikaze qui nous provoque pour que nous tombions dans le piège de la guerre. Il est prêt se laisser détruire pour que son idéologie se répande sur tous les continents.

    Il faudrait peut-être mieux que la France tente de créer une coalition politique pour "l'assécher" diplomatiquement, financièrement au niveau des ventes de pétrole, militairement au niveau des livraisons d'armes.    

    Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, à l'expression de mes salutations distinguées.

     

     

                                                                                                        André THERET

    PJ: Citation du 30 mai 1960, en retour.

     

    NB: 1) J'adresse une copie de ce courrier:

                - aux associations d'anciens combattants.

                - au rédacteur en chef du journal "Le Monde."

            2) Je pourrais vous envoyer ce courrier par mail

                mais je n'ai pas votre adresse personnelle.                               

     

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