Dominique Sopo sera ce dimanche au camp
militaire de Thiaroy au Sénégal
« Ce dimanche, je serai au camp militaire de Thiaroye au Sénégal, pour la cérémonie officielle présidée par le président Bassirou Diomaye Faye en hommage aux Tirailleurs sénégalais, victimes d'un massacre colonial par l'armée française le 1er décembre 1944.
Depuis quelques jours, entre 1200 et 1600 tirailleurs étaient réunis dans ce camp où l'armée française les avait envoyés depuis la France où des arriérés de solde ne leur avaient pas été versés. La France promit à ces hommes qui avaient été prisonniers des Allemands que leurs soldes leur seraient versées au Sénégal, habile et malhonnête moyen pour éviter que leurs revendications ne se déroulent sur le sol national.
Exigeant leur dû, les Tirailleurs - venus du Sénégal mais aussi de nombreux autres territoires colonisés de l'Afrique subsaharienne - ne se laissèrent pas impressionner par le général Dagnan qui en éprouva une fureur toute coloniale. Car, dans le monde colonial, les "nègres" ne pouvaient tenir tête au pouvoir colonial. Leur sort était de courber encore et toujours l'échine. Cette fureur du général Dagnan, confronté à la détermination des Tirailleurs sénégalais, n'était donc pas qu'une disposition personnelle. Elle découlait de la trame même du pouvoir colonial.
D'ailleurs, le massacre du 1er décembre fut la conséquence directe d'une répression demandée par le général Dagnan à son supérieur et validée par ce dernier.
Et ce 1er décembre, le sang coula. De nombreux morts, de nombreux blessés. Et en guise de justice, l'arrestation, le procès et les peines pour des Tirailleurs sénégalais pourtant victimes de faits criminels.
Cette violence coloniale est souvent euphémisée, quand elle n'est pas niée. Ses conséquences sont souvent incomprises. Pourtant, ne pas comprendre que ce qui nous lie à des pays anciennement colonisés, c'est aussi le souvenir - dans les esprits, dans les chairs, dans les imaginaires - de cette violence passée, c'est ne rien comprendre à l'Histoire pas plus qu'à ses effets. Ses effets dans les pays où se déploya cette violence. Ses effets chez celles et ceux qui sont issus des peuples meurtris par le colonialisme et qui, pour une part d'entre eux, vivent aujourd'hui en France.
Cette Histoire de la violence doit être contée si on veut pouvoir en soigner les plaies encore béantes. Non pas contée en un éternel ressassement ou ruminement. Mais contée pour que la vérité soit dite et que nous puissions, ensemble, en France, au Sénégal et ailleurs, nous projeter ensemble et avec sérénité vers un avenir lourd de défis et riche de potentialités. »
Dossier : il y a 80 ans
le massacre de Thiaroye
Dossier : que s'est-il passé à Thiaroye le 1er décembre 1944 ? Pourquoi la France doit-elle reconnaître toute la vérité sur ce massacre ? Quelles commémorations au Sénégal et en France ?
Photo extraite de « Camp de Thiaroye », le film d’Ousmane Sembène qui a commencé à sortir de l’oubli cette tragédie. Photo : (C) Prod.
Le train des commémorations de 2024 liées aux différentes cérémonies autour du 80ème anniversaire de la Libération de la France et au 11 novembre qui marque la fin la Première Guerre mondiale nous rappelle la place centrale occupée par des soldats venus de l’empire colonial français dans les guerres du XXème siècle.
Dans l’Hexagone tout comme au Sénégal, l’année 2024 se clôt sur le souvenir d’un épisode emblématique des pires aspects du sort fait aux soldats coloniaux lors des deux guerres mondiales. Alors que la Libération de la France et la défaite du pouvoir nazi semblaient ouvrir de nouvelles voies vers l’émancipation des peuples colonisés, alors que le pouvoir colonial était de plus en plus contesté dans le monde, est survenu le massacre des Tirailleurs au camp de Thiaroye, dans la périphérie de Dakar, le 1er décembre 1944. Ce drame de Thiaroye a inauguré une sombre période de l’histoire de la France marquée par des guerres visant au maintien de l’Empire colonial durant lesquelles une série de crimes coloniaux ont été commis, au Vietnam, à Madagascar, en Côte d’Ivoire, en Algérie, au Cameroun et ailleurs.
Le 1er décembre 2024, on commémorera au Sénégal et en France le massacre de centaines de « tirailleurs sénégalais », originaires de toute l’Afrique Occidentale Française, qui réclamaient à Thiaroye, près de Dakar, le 1er décembre 1944, leur dû, c’est-à-dire leurs soldes pour leurs années de captivité qu’ils avaient passées en France depuis 1940. Leur violente répression fut un crime de l’armée française longtemps nié par une version officielle mensongère qui inventa une « mutinerie » et minimisa fortement le bilan de la tuerie. Il s’agit d’un crime de masse qui n’est toujours pas reconnu officiellement comme tel par la France et dont le nombre exact des victimes reste à établir.
Le présent dossier commence par récapituler les articles publiés depuis l’année 2004 sur le site histoirecoloniale.net (qui s’intitulait, jusqu’en 2017, ldh-toulon.net). Il reprend aussi une tribune publiée dans le quotidien Le Monde, accompagnée du lien vers une pétition en faveur de la reconnaissance par la France de ce drame. Ainsi qu’un agenda intitulé « Morlaix-Thiaroye 1944 – 2024 » des diverses initiatives qui ont lieu pour ces 80 ans, tant au Sénégal qu’en France, dont celles du Réseau Mémoires & Partages.
On y trouve aussi un article paru le 11 novembre 2024 sur le Blog de Histoire coloniale et postcoloniale sur Mediapart qui rappelle l’histoire de la sculpture érigée en 1924 à la fois à Reims et à Bamako en hommage aux tirailleurs africains qui ont joué notamment un rôle décisif dans la défense de la ville de Reims. Cet article attire aussi l’attention sur l’absence aujourd’hui dans les listes de noms gravés sur nos monuments aux morts de ceux des soldats nés au loin dans l’empire colonial et morts ici en combattant pour la France. Une absence choquante, injuste, et qui doit être réparée.
Ce dossier contient enfin le programme d’un important colloque scientifique organisé à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar les 2 et 3 décembre 2024 qui témoigne de la volonté du Sénégal de ne pas laisser aux autorités françaises le monopole de la narration de cet épisode. Un épisode tragique qui fait aussi partie de son histoire et doit intégrer la mémoire de ses citoyens.
En voici les différents éléments.
Cheikh Sakho, membre de la rédaction du site histoirecoloniale.net
• Nos publications depuis 2004 sur les tirailleurs et sur Thiaroye
• Tribune : « Il est temps que le massacre de Thiaroye soit officiellement reconnu par la France »
• Programme du colloque de Thiaroye à Dakar – 2 et 3 décembre
• Morlaix-Thiaroye 1944 – 2024, agenda des commémorations du 80e anniversaire
• Les initiatives en 2024 du Réseau Mémoires & Partages
• 11 Novembre : ne pas oublier les fusillés pour l’exemple et les soldats coloniaux
Paris : projection-débat
de « Thiaroye 44 » au Majestic Bastille
SOURCE : Dossier : il y a 80 ans, le massacre de Thiaroye
Massacre de Thiaroye en 1944 :
« C’est un crime de masse prémédité »
Le 1er décembre 1944, des dizaines de soldats africains appelés "tirailleurs" sont exécutés par l'armée française dans le camp de Thiaroye, au Sénégal. Ces hommes, qui ont combattu pour la France lors de la guerre et anciens prisonniers des nazis, réclamaient le paiement de leur solde. Selon la version officielle, la répression fait suite à une mutinerie. Une thèse réfutée par l'historienne Armelle Mabon, maître de conférences à l'Université Bretagne Sud. Elle dénonce un mensonge d'Etat et un crime de masse prémédité. A l'occasion du 73e anniversaire du massacre de Thiaroye, Armelle Mabon revient sur cet épisode sanglant de la colonisation française en Afrique de l'ouest.
La France va devoir fermer
ses bases au Sénégal, dit
le président sénégalais à l'AFP
Le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye a indiqué jeudi que la France allait devoir fermer ses bases militaires au Sénégal, dont la présence est incompatible selon lui avec la souveraineté de son pays.
Lors de la commémoration du 80e anniversaire du massacre des tirailleurs sénégalais par les forces coloniales françaises, le président Bassirou Diomaye Faye a déposé une gerbe de fleurs au cimetière de Thiaroye, proche du camp où se sont produits les faits. La France était représentée par son ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot.